Transcription épisode 2
Ceci est la transcription de l’épisode 2 de Nolotec Podcast.
Comme nous l'avons abordé dans l'épisode précédent, le succès inattendu de la Blue Box transforme Jobs en entrepreneur : il veut dorénavant créer des produits pour transformer la vie des gens. Il va chercher quel autre produit électronique il pourrait vendre.
C'est Woz qui va le convaincre que le futur c'est l'ordinateur personnel, Jobs n'est pas convaincu au départ, lui qui pense plutôt vendre des gadgets électroniques dans la droite lignée de la blue box
C'est au cours d'une réunion avec le HomeBrew Computer Club que Woz a une révélation.
Homebrew Computer Club (HCC)
Le HomeBrew Computer Club a pour but, au départ, de réunir des fans de technologie pour partager leur passion. A terme, les participants veulent démocratiser les technologies de l'électronique puis de l'informatique pour les rendre faciles d'utilisation et les rendre abordables.
Cela correspond tout à fait à la vision qu'a Woz de la technologie.
La premiere réunion a lieu en janvier 1975 : 30 personnes y participent dans le garage de Gordon French à Menlo Park. Cette première rencontre tourne autour d'un Sujet principal et brulant d'actualité : les premiers ordinateurs personnels vendus en kit. Ces nouveaux produits sont rendus possibles par l'arrivée des premiers micro processeur abordables.
Gordon French est d'ailleurs l'un des premiers à avoir reçu l'ALTAIR et à l'avoir monté. L'ALTAIR est un ordinateur très important dans l'histoire de l'informatique. Il devient très connu quand il apparait en une du magazine Popular Mechanics. D'ailleurs, le magasine passe de main en main lors de la réunion. L'excitation est palpable car même si l'ALTAIR est rudimentaire, les possibilités offertes par ce genre de technologie semble illimité.
Rudimentaire l'ALTAIR ? On peut le dire. Par exemple, son interface est une suite de bouton et les résultats sont affichés par des LED, en binaire. Le programmer prend énormément de temps (il est obligatoire de programmer en binaire) et il n'y a pas de système de stockage de l'information. Il faut donc tout recommencer à chaque redémarrage. Insérer un simple programme peut prendre à chaque fois plus de 30 minutes.
Cependant, c'est ce que représente l'ALTAIR qui émoustille les participants. Juste le fait d'avoir un ordinateur à soi, 24H/24H, sans avoir à le partager avec qui que ce soit est déjà quelque chose d'extraordinaire.
Bill gates, alors à Harvard, est lui aussi subjugué par l'ALTAIR quand il lit le magasine Popular Mechanics. C'est ce que va le pousser à laisser tomber ses études pour créer Microsoft dans le but de porter le langage BASIC sur l'ALTAIR.
Woz, de son côté, est beaucoup plus mesuré. Il réalise que l'ALTAIR est au final très similaire au Cream Soda Computer qu'il a conçu 4 ans auparavant. La seule Différence, et elle est de taille, est que l'Altair a un microprocesseur alors que le Cream Soda Computer a besoin d'un plus grand nombre de puces.
Après cette première réunion, Woz est décidé et veut faire son propre ordinateur. Il est très inspiré par ce qu'il a vu et pour la première fois, pense qu'il pourra, grâce aux nouveaux microprocesseurs, arrivé à faire un ordinateur digne de ce nom.
Néanmoins, il n'est pas impressionné par l'ALTAIR. Il veut aller plus loin. Par exemple, il veut que son ordinateur soit plus facile à programmer et à manipuler. On oublie donc les panneaux de controle avec leurs boutons et LED. Il décide que toute les interactions se feront avec un clavier connecté à une télévision.
Il se trouve que Woz a toute l'Expérience qu'il faut : il a déjà construit une mini console de jeu qui se connecte à la télévision avec sa propre version de Pong et de Breakout, il a aussi conçu un terminal, une sorte de clavier évolué, pour accéder à Arpanet (ancêtre d'Internet) et qui affiche des lettres sur une télévision.
Son terminal a l'avantage de faire tout ce que fait un télétype qui lui coute des milliers de dollars alors que son terminal coute dix fois moins.
Apple I
Woz se lance alors le développement de ce qui sera appelé l'Apple I. Il y a plusieurs raisons à la naissance de cet ordinateur.
La première est que Woz pense qu'il est possible de faire un meilleur ordinateur que l'ALTAIR et cela pour moins cher.
Deuxièmement, il veut montrer à ces camarades du club qu'il respecte énormément que lui aussi est intelligent et compétent. C'est pour cela d'ailleurs qu'il compte dès le départ partager gratuitement les plans de sa création, principalement afin d'être reconnu et de se socialiser.
Woz a une idée différente de ce qu'est un ordinateur personnel. Les professionnels de l'époque pensent qu'un ordinateur doit être proche d'un avion de ligne dans son interface. Quelque chose de puissant mais de complexe à utiliser. D'ailleurs, les ordinateurs de l'époque ont souvent une interface qui ressemble de loin à un cockpit d'avion.
Woz veut au contraire une interface la plus simple possible et la moins chère. C'est pour cela qu'il se tourne vers une interface clavier / écran.
Il y aura d'ailleurs un avant et un après Apple I : à partir de la sortie du nouvel ordinateur de Woz, ils reprendront tous son principe du couple clavier / écran, ce qui n'était pas le cas avant.
Afin de développer au plus vite un prototype, Woz se base sur son terminal pour connexion Arpanet et va lui ajouter un microprocesseur ainsi que de la mémoire.
Woz est un grand fan des calculatrices, notamment celles vendues par HP. Il va s'en inspirer. En effet, les calculatrices étaient en quelque sorte des petits ordinateurs avec processeur et mémoire. Cependant, elles avaient un avantage par rapport à tous les ordinateurs : le démarrage est instantané, sans aucun pas de temps de chargement et cela grâce à une Rom intégré. Le Cream Soda Computer et l'ALTAIR n'ont pas de programme de démarrage, résultat : il faut plus de 30 minutes de manipulation avant que l'ordinateur soit fonctionnel à chaque mise sous tension. Grâce au travail acharné de Woz, le programme de démarrage de l'Apple I prend moins d'une minute avant que l'ordinateur soit utilisable.
Woz choisit au départ un microprocesseur de chez Motorola, le 6800 (à ne pas confondre avec le 68000 qui fera lui-aussi parti de l'histoire d'Apple). Il le choisit en partie parce qu'il peut l'acheter à prix réduit, 40$, grâce son travail chez HP. Quelque semaine plus tard, MOS Technologies sort son propre microprocesseur, le 6502, qui est totalement compatible avec les connexions du 68000 mais a l'avantage d'être deux fois moins cher. Il est donc choisi pour être le processeur de l'Apple I.
Le travail sur l'Apple I avance doucement. En effet, Woz rentre chez lui le soir pour manger et repart chez HP après diner pour travailler sur l'Apple I. Il a à sa disposition tout pour faire des soudures et tester sur son poste de travail.
Quand le premier prototype fonctionne, Woz est extrêmement fier. Il a été capable, seul, de faire quelque chose que personne avant lui n'avait réussi. Il est content de son travail qu'il distribue gratuitement plus de 100 copies des plans de l'Apple I, programme de lancement (appelé monitor) inclus.
L'Apple I possède un ensemble de 30 puces, comme ALTAIR mais est un ordinateur beaucoup performant et versatile.
Woz a pour objectif que son ordinateur soit le plus accessible possible. Il est donc impensable de programmer directement en binaire. Il doit donc intégrer un langage de programmation. Il a appris le FORTRAN comme langage de programmation, langage alors très populaire dans le milieu professionnel.
Cependant, le langage qui le vent en poupe auprès des membres du club est le BASIC, déjà disponible sur ALTAIR grâce à Bill Gates et sa société Microsoft. Woz décide ainsi de porter BASIC sur le microprocesseur 6502. Il est d'autant plus motiver que cela ferait de lui le premier au monde à le faire, et il espère être connu et reconnu pour cela.
Woz prend quelques libertés pour sa version de BASIC. Il décide qu'il ne gèrera pas les chiffres à virgules car ce serait trop long à développer et les chiffres entiers sont suffisants pour faire des programmes classiques et des jeux. De plus, il ne gérera que les chiffres entre –32,768 à +32,787. Enfin, seules les lettres majuscules de l'alphabet américain (donc pas d'accent) sont possibles.
Au cours du développement, Jobs lui demande s'il peut utiliser la DRAM d'Intel, bien meilleure que celle utilisée. Woz répond que c'est possible mais que malheureusement c'est beaucoup trop cher par rapport à l'objectif de prix qu'il s'est fixé. Après quelques appels téléphonique dont il a le secret, Jobs récupère de la DRAM gratuite d'Intel. Woz est Estomaqué car ce type de mémoire est alors assez rare et chère. Woz n'aurait jamais osé passer ces appels à cause de sa timidité. Jobs est là pour le compléter.
L'Apple I fonctionne mais il ne possède pas de périphérique pour stocker des données. Woz est obligé de taper son programme de 4000 octets à chaque démarrage pour utiliser le BASIC. Cela prend 40 minutes (30 minutes avec l'habitude). À chaque fois que l'Apple I est éteint, il faut tout retaper et donc perdre beaucoup de temps.
C'est pour cela que Woz développe une interface pour un lecteur de cassettes. A l'époque, la solution la plus simple et économique pour stocker des données pour un ordinateur est d'utiliser les cassettes que l'on retrouvera plus tard dans les Walkman de Sony.
Les réunions du club HomeBrew se font maintenant toutes les deux semaines. Woz y est à chaque fois et y présente, pas devant tout le monde mais au fond de la salle, son Apple I et ses différentes avancées. Il essaie de combattre sa timidité naturelle afin de présenter son travail dont il est si fier.
Cependant, l'accueil est souvent froid mais cela ne calme en rien l'ardeur de Woz. Il distribue à qui le veut les plans de sa machine.
Néanmoins, Jobs remarque que les schémas sont souvent pris mais l'ordinateur est rarement construit. Soit par manque de temps, soit par manque de compétences ou les deux. Comme pour la Blue Box, c'est Jobs qui voit le potentiel économique de la création de Woz. Il propose à Woz de construire et vendre les circuits imprimés. Les clients n'auront plus qu'à acheter et souder les puces.
Cela permettrait aux clients d'avoir un ordinateur en quelques jours au lieu de quelques mois, le plus gros du travail ayant été fait. De plus, les membres du club ont des puces soit gratuitement soit à des prix dérisoires.
Woz n'est pas convaincu : il ne voit pas comment il pourrait gagner de l'argent ainsi. Il faut une mise de 1000 $ pour imprimer les circuits et ainsi en vendre au minimum 50 pour juste rentrer dans ses frais. Or, il n'y a que 500 membres du club, et la plupart sont fans de l'ALTAIR et certains ont déjà un ordinateur.
Mais jobs trouve l'argument qui fait mouche : je cite : Même si on perd notre argent, on aura fait une entreprise. Pour une fois dans notre vie, nous aurons une entreprise. Au moins, on pourra dire qu’on a créé une entreprise à nos enfants »
C'est ainsi que les deux meilleurs amis créent leur entreprise.
Le nom Apple
Il faut maintenant trouver un nom. Les deux Steve ont beaucoup de mal à en trouver un. Ils essaient de trouver de l'inspiration dans les paroles de musique mais rien ne vient. Un jour, Jobs revient d'un camp hippie en Oregon appelé Apple Orchard (verger de pommes). Il propose alors Apple Computer.
Cela a l'avantage d'être un nom proche des gens et pas technique. Différent de toute la concurrence comme IBM, DEC, HP, Texas Instruments, etc. C'est un nom qui est presque pas sérieux.
Il se trouve que c'est une semaine où le régime exclusif de Jobs est la pomme.
Il considère d'ailleurs que la Pomme est un produit parfait : nourrissant, facilement transportable, assez robuste et joli. Il veut que sa société soit aussi parfaite que la pomme.
La pomme se retrouve aussi un peu partout : la pomme qu'Eve mange au jardin d'Eden, source de savoir. C'est aussi le nom du label des Beatles dont Jobs est fan. Enfin, c'est aussi la pomme qui, dans la légende, permet à Newton de trouver sa théorie de la gravitation.
Jobs fait confiance en son instinct pour le choix du nom de la société. C'est une chose qu'il fera tout le temps par la suite, préférant écouter son instinct plutôt que de faire de longues études de marché.
Woz s'inquiète de la similitude du nom Apple Computer de celle d'Apple Records et il a raison. Jobs le rassure en disant que les entreprises sont sur deux marchés et continents totalement différents donc ça ne pose pas de problème. Cela deviendra un problème quand plus de 20 ans plus tard, Apple sortira l'iPod.
Le Dernier avantage du nom Apple est qu'il se trouve avant Atari dans l'ordre alphabétique. Cela est Important à l'époque : être en premier dans l'annuaire (ou sur les listes d'entreprise pour les salons) est quelque chose de primordiale.
Prenons l'exemple de l'industrie du jeu vidéo où nous avons des exemples parlants. Des anciens d'Atari, mécontent du traitement des programmeurs, partent pour créer leur propre société. Ils décident de l'appeler Activision, qui a l'avantage d'être avant Atari dans l'ordre alphabétique.
Pour les mêmes raisons, des anciens d'Activision créent leur propre entreprise en 1984 qu'ils appellent Accolade, avec 2 c.
En 1987, des anciens d'Activision, encore, fondent leur société qu'ils appellent Acclaim, là aussi avec 2 c.
Dernier exemple, Absolute Entertainment. Vous comprenez le principe...
Une rumeur dit que le nom d'Apple, ainsi que son logo de pomme avec une bouchée en moins, serait un clin d’œil à la mort d’Alan Turing, héros de la Seconde Guerre mondiale et précurseur de l’informatique moderne. Il s'est effectivement donnée la mort en croquant dans une pomme qui l'a lui-même empoisonnée. De plus, Alan Turing était homosexuel et le logo de la pomme, avec ses 6 couleurs, rappelle un peu le rainbow flag.
Cependant, c'est une rumeur qui est totalement fausse. D'abord parce que l'histoire d'Alan Turing commencera à être popularisé bien plus tard. Ensuite parce que le tout premier logo d'Apple n'est pas une pomme croquée barrée de multiples couleurs.
De toute façon, cette version a été démentie depuis par Jobs et Woz.
Création et logo
Apple Computer est fondée le 1er avril 1976. Encore un clin d'oeil pour l'amour des canulars des Steve.
Afin de financer les débuts de l'entreprise, Jobs vend son combi Volkswagen et Woz vend sa calculatrice HP65 le tout pour 1000$.
Pour la petite histoire, Jobs vend au départ sa voiture pour 1000$ mais ne récupère que la moitié quand le moteur rend l'âme quelque semaines après la vente.
Woz et Jobs ont un ami en commune rencontré chez Atari : Ronald Wayne. Il est choisi comme co-fondateur car il est plus vieux (21 ans plus vieux que Jobs par exemple) et surtout il a suffisamment d'expérience pour écrire tous les documents légaux nécessaire à la création de l'entreprise. En gros, il sait faire tout ce que Woz et Jobs ne savent pas faire.
Il est aussi très important car les deux Steve se sont rendus compte que c'est souvent lui qui arrive à régler les différents entre eux, une sorte de voix de la raison.
C'est d'ailleurs Ron Wayne qui dessine le tout premier logo d'Apple. Il ne restera pas dans l'histoire car il est assez archaïque. En effet, il ressemble à une gravure du 17ème siecle sur laquelle on peut voir Isaac Newton sous un pommier.
La répartition des parts est comme suit : 45% pour Jobs, 45% pour Woz et 10% pour Wayne.
A noter que le père de Woz s'est battu pour que son fils ait plus de 50% de part, considérant le travail de Jobs comme négligeable par rapport au travail technique de Woz. Jobs sera même traité de parasite, se nourrissant du travail de Woz sans rien apporter de son côté. Alors que Jobs part en pleurant en disant qu'il était prêt à tout abandonner et à donner 100% de part à Woz, c'est Wozniak qui va se battre afin que les deux aient la même part.
Woz est le seul à reconnaitre l'apport de Jobs dans le duo.
Quelques semaines après la création de l'entreprise, Wayne regrette son investissement. En effet, il a 42 ans, et il a déjà créé des sociétés dans le passé, et à chaque c'était un échec retentissant lui coutant de l'argent.
Les parts de Wayne seront rachetés pour 800$ deux semaines plus tard. Aujourd'hui, ses parts représenteraient plusieurs centaines de milliards de dollars.
Ron Wayne me fait penser à Pete Best et à Jason Everman. Pete Best était le batteur des Beatles qui quitte le groupe juste avant son succès. Jason Everman est un guitariste qui était le deuxième guitariste de Nirvana. Il a été viré en 1989. Everman rejoint alors Soundgarden en 1990 comme bassiste (où il jouera notamment une reprise des Beatles de Come Together).
Hewlett-Packard
La création de l'entreprise n'est pas finalisée tant qu'un élément juridique n'est pas résolu. En effet, tout travail d'un salarié d'HP est la propriété d'HP. Donc en théorie, l'Apple I qui a été développé chez HP par Woz qui est un salarié d'HP est la propriété de la société.
Nous avons vu que Woz est un homme intègre et honnête, donc il ne veut pas cacher à son employeur le fruit de son travail. D'autant plus qu'il est très fidèle à la société qu'il aime beaucoup, et il pense depuis le début que ce serait mieux qu'HP s'occupe de vendre son ordinateur plutôt que de créer une société avec tous les soucis associés.
L'Apple I est présenté aux managers d'HP qui rejette l'ordinateur. En effet, ils ne sont pas convaincus du principe d'utilisation de télévision. Ils ont peur qu'en cas de dysfonctionnement de la TV le client rejette la faute sur HP.
De manière générale, le projet ne correspond pas vraiment au fonctionnement d'HP.
Byte Shop
La mauvaise nouvelle sera de courte durée. Alors que Woz est à son bureau chez HP, il reçoit un Coup de fil de Jobs. Jobs lui dit : t'es bien assis, on a une commande de 25 000$.
En effet, Le gérant d'un magasin d'électronique Byte Shop, Peter Terrell a vu la démo de Woz au club et veut acheter 50 ordinateurs pour 500$ chaque soit un chiffre d'affaires de 25 000$ : c'est plus que le salaire annuel de Woz. Woz est époustouflé, il n'y croit pas. Pour lui, c'est l'événement le plus important de l'histoire de l'entreprise car c'est celui qui lance tout. Rien après ne sera aussi important et aussi surprenant par la suite.
Jobs veut vendre l'Apple I pour 500$ et Terrell veut 33% de marge : cela donne un prix de vente de 666$. Cela fait plaisir à Woz qui adore les nombres des chiffres qui se répètent. D'ailleurs, il a ouvert une ligne téléphonique qui raconte des blagues polonaises (qui avait beaucoup de succès : 2000 appels par jour) et à chaque fois qu'il doit choisir un numéro de téléphone, il utilise un numéro avec des chiffres qui se répètent.
Cependant, personne ne fait le lien avec le chiffre 666 et le satanisme. Les co-fondateurs se défendent en disant qu'ils n'avaient pas vu l'exorciste.
Woz demande à Jobs comment s'est passé la commande. Il se trouve que Terrell était présent lors d'une demo de l'Apple I au club. Il croise alors Jobs et lui donne sa carte de visite en lui disait qu'il fallait qu'ils restent en contact. Du coup, le lendemain Jobs vient à son magasin (évidemment pieds nus) : "je reste en contact"...
Terrell est un habitué des ordinateurs. Il vend des ordinateurs en kits comme l'Altair depuis le début. Pour booster ses ventes, Il a des employés qui soudent les puces pour éviter aux clients de le faire. Il les vend plus rapidemment que le temps qu'il faut pour souder les puces. Terrell se rend compte qu'il existe un gros marché encore insatisfait, bien au-delà des membres du club HomeBrew. Il cherche alors un ordinateur déjà construit lui permettant d'en vendre plus rapidemment.
Jobs et Woz, eux, ne se rendent pas compte de cette opportunité de marché, c'est pour cela qu'ils sont tous les deux surpris par la commande. Elle leur fait réaliser le potentiel énorme des ordinateurs personnels. Woz se rend compte alors que son ordinateur peut, à terme, aider tout le monde en permettant de jouer aux jeux vidéo à la maison, d'utiliser un logiciel de traitement de texte qui pourrait remplacer la machine à écrire (un type de logiciel qui n'existe pas encore d'ailleurs), et que, de manière générale, un ordinateur personnel peut aider tout le monde à faire son travail et dans sa vie de tous les jours.
Mais avant tout cela, il faut répondre à la commande. Pour cela il faut trouver toutes les pièces pour produire l'ordinateur et cela au meilleur prix.
Steve Jobs se démène pour trouver les pièces les moins chères possibles en négociant avec différents fournisseurs. Les deux Steve et leurs amis travaillent jour et nuit pour produire et tester les cinquante exemplaires qui doivent être livrés dans les trente jours.
Avec la commande du Bytes Shop en poche, Jobs fait le tour de la SC afin de trouver des financements. Il n'impressionne pas : il est jeune, il a les cheveux longs, il est mal habillé, bref, les banques l'ignorent. Un fournisseur, Bob Newton, se souvient de Steve comme d'un "petit garçon agressif qui ne se présentait pas de manière très professionnelle". Mais il a été impressionné par l'intensité du jeune Jobs et a dit qu'il vérifierait avec Terrell pour confirmer la commande.
Quelqu'un de moins déterminé que Steve Jobs aurait dit : "D'accord, je rappellerai dans quelques jours", et serait parti. Steve a refusé de partir avant que Newton n'ait passé l'appel. L'adjectif intense revient souvent pour décrire Jobs à l'époque, un autre est aussi utilisé, moins sympathique : casse-bonbon, pour ne pas dire autre chose.
Woz et Jobs reçoivent les cartes mères produites dans une autre société à Santa Clara, ils achètent toutes les puces et embauche Dan Kottke ainsi que la soeur de Jobs, Patty, pour souder les puces sur la carte pour un salaire de 1$ la carte. Tout cela dans le garage des parents de Jobs, dans la grande tradition de la SC.
Quand une douzaine d'Apple I est assemblé et testé par Woz sur sa TV, Jobs les amènent au Byte Shop.
Alors que Jobs apporte les première cartes APPle I, il y a un problème : Terrell pensait que tout était fourni, l'ordinateur, avec son casier, son alimentation, le clavier et la TV. Or, Jobs n'amène qu'une carte électronique.
Pour Woz et Jobs, un ordinateur complet, c'est la carte mère avec toutes les puces. Du coup, Terrell appelle un ébéniste et fournit lui-même un casier en bois.
En mars 76, Woz présente officiellement l'Apple I Homebrew Computer Club. Le club a bien changé, fini les réunions dans un garage, maintenant tout se passe dans un amphithéâtre de la célèbre université de Stanford. Woz est face à un public de plus de 500 personnes, ce qui impressionnant pour lui qui est timide. Jusqu'à présent, chaque présentation de son ordinateur se faisait en marge des présentations principales, en petit comité.
L' Apple I a été vendu de juillet 76 à aout 77. A peu prés 200 ont été produits.
En 2014, un Apple I en excellent état a été vendu pour un prix record de 905 000 $. On en trouve régulièrement en vente, les prix ont tendance à monter en flèche pour ce qui devient aujourd'hui un ordinateur historique de la courte histoire de l'informatique.